C’est un exercice périlleux que de proposer la paix, tout comme est périlleux le chemin qu’il est nécessaire d’emprunter pour la rendre accessible sans brader ses exigences.
Le chemin a déjà été tracé et il convient de faire mémoire :
– de tous ceux qui ont été torturés, assassinés, humiliés pour avoir ancré le rêve de la paix dans notre humanité,
– de toutes les victimes de la haine et de tous ceux qui l’ont combattue en donnant leur vie.
Issue de tous les horizons culturels, religieux, politiques la paix est multiforme, et la définition qu’on peut en faire ne saurait l’enfermer dans un espace ou un temps limités.
Quelques-unes de ses caractéristiques peuvent être cependant soulignées :
- Transcendant les catégories politiques et religieuses, la Paix est le fruit d’une quête universelle.
- Concrète, elle fait sortir ceux qu’elle conduit des rives de l’abstraction mortifère, et la gangue de l’utopie ne lui convient pas.
- Sans frontières, elle inspire et oriente vers plus d’humanité aussi bien les religions et les sagesses que les Droits de l’Homme.
- Compatissante, elle recherche, elle soigne, elle bâtit, elle embellit, elle protège, elle éduque, elle harmonise.
- Indivisible, elle se nourrit de la pensée et de l’action de ceux qui croient au ciel et de ceux qui n’y croient pas.
Ainsi décrite, l’exigence de paix oblige également à mettre en garde contre le pacifisme et l’angélisme, qui nuisent à son action. Ce n’est pas une mince affaire non plus que de relier constamment les appels de la raison et les sollicitations du cœur, mais les dissocier c’est s’exposer à figer la paix dans un rigorisme ou un sentimentalisme de mauvais aloi.
De la même façon, une logique de paix doit s’efforcer de suivre une voie médiane entre l’intégrisme et le laïcisme qui gangrènent notre société. Elle a le mérite d’arbitrer avec justesse ce qui sert le bien commun et ce qui lui nuit. Pourquoi douter – sans tomber dans l’idéalisme – que la politique et la religion puissent s’entendre sur des valeurs républicaines qu’elles partagent, pour contrer le terrorisme et le « neutraliser » de l’intérieur, pendant qu’à l’extérieur les combats s’engagent pour le faire reculer ?
L’action des religions pour la paix, l’action d’une politique d’apaisement, peuvent conjuguer leurs forces sans qu’il faille abroger la loi de 1905 !
C’est ainsi que des « maisons de la paix », sans appartenance confessionnelle et sans étiquette politique, peuvent être utiles, comme le sont les médiations dans un conflit.
Cette utilité-là vaut la peine d’être entendue si on ne veut pas rajouter de la violence à la violence déjà existante.