La jeunesse actuelle a appris, soit par esprit d’ouverture, soit par nécessité, à surmonter les clivages économiques, sociaux, confessionnels, politiques, ethniques… qui paralysaient les générations antérieures.
Il ne s’agit pas d’idéaliser les changements ni de nier l’individualisme, ni même l’égoïsme, d’une jeunesse privilégiée, mais de tenir compte de modifications d’ordre sociologique qui conduisent beaucoup de jeunes favorisés et défavorisés à se rencontrer et réfléchir ensemble aux inégalités de perspectives d’avenir.
Répondre à ce désir de rencontre, c’est déjà structurer une société plus fraternelle et la rendre capable :
- de trouver des solutions en s’appropriant les mécanismes d’une société,
- de vouloir s’y insérer pour en limiter les injustices,
- de choisir (et non plus de subir) un modèle social plus égal.
Pour être fructueuses, ces rencontres exigent une réflexion de la part de tous les acteurs de la vie en société.
La relation inter-générationnelle est indispensable; les seniors ont un rôle à jouer pour encadrer des initiatives, canaliser une générosité qui peut être irréaliste, empêcher la précipitation.
Leur expérience et la sagesse qui, normalement, en résulte peuvent à leur tour se revivifier au contact d’une jeunesse désireuse de se projeter dans l’avenir et de le préparer grâce à des idées nouvelles qu’il faut considérer sérieusement.
Le tissu social a été trop déchiré par l’éloignement des générations entre elles :
- incompréhensions familiales,
- adoption par les jeunes d’un code de langage spécifique qui les isole des plus anciens,
- rivalités dans le travail ou lors des recherches d’emploi.
Ce tissu pourrait se régénérer autour d’un avenir à construire ensemble, mais en maintenant chaque classe d’âge à sa place : ni le « jeunisme », ni le rajeunissement à tout prix, ne sont favorables au dialogue social cohérent; ils poussent à l’arrogance chez les jeunes, à une aigreur chez les anciens.
Ils ont contribué à creuser un véritable fossé d’incompréhension, qui peut en partie expliquer le délaissement mutuel, des jeunes par les anciens et des anciens par les jeunes.
Recréer des liens, c’est accepter de transmettre, donc de conseiller, soutenir (et c’est le privilège de l’âge) les plus jeunes, en vue de leur donner une place, au lieu de les écarter et de les éloigner finalement un peu plus de la citoyenneté, un peu plus des valeurs que nous leur demandons de respecter.
La jeunesse est pourtant mûre pour accueillir ces valeurs.
Il s’agit d’en faciliter l’accès en donnant un sens à l’avenir qu’ils pressentent, sans imposer des limites qui appartiennent au passé : la culture élitiste, par exemple, fait des ravages, non parce qu’elle souhaite maintenir un enseignement d’excellence – ce qui est louable – mais parce qu’elle restreint la signification du mot intelligence et qu’elle ne fait pas confiance à l’expression d’intelligences multiples et nouvelles qui se développent actuellement.
Cette absence de confiance est dramatique; elle renforce une lutte de classe entre jeunes et prolonge un conservatisme chez certains d’entre eux, qui les mène à l’individualisme et la xénophobie, en totale contradiction avec le haut niveau d’études qui les prépare à la complexité de la mondialisation et à la diversité des cultures.
Le savoir, il est important de le rappeler, ne peut se dissocier de la sagesse. Or celle-ci est intimement liée à la recherche de la paix. Cette paix s’adresse à tous ainsi que les conditions de son exercice, c’est-à-dire l’égalité d’accès à la culture et à l’emploi.